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In memoriam Bui Huy Duong

(1937-2013)

Pour présenter notre père

Publié le 7 Juin 2013 par Jean Bui, Raphaël Bui

Pour présenter notre père

Huy Duong Bui est né à Hanoï le 18 mars 1937, le seul garçon au milieu de 3 sœurs. C'est son grand-père paternel, un « lettré » qui lui donne le goût d'étudier, alors même que la guerre et la famine obligent sa famille à partir à la campagne et le privent d'école de 1945 à 1949.

Il accompagne alors son père à la chasse et à la pêche, contemple les étoiles, et développe un sens pratique – notamment manuel - et une curiosité qui ne le quitteront plus.

Cependant son niveau scolaire en français ne lui permet pas d'entrer au collège. C'est en suivant pendant 3 ans des cours privés, puis en étudiant 2 ans en autodidacte, qu'il réussit brillamment au baccalauréat en 1955 et obtient une bourse pour étudier en France, à Paris, en prépa hypotaupe à Henri IV.

Entré en 1957 à l'Ecole Polytechnique, puis en spécialisation aux Mines de Paris, il s'engage dans la recherche en Mécanique, embauché en 1961 par la direction des études et recherches d'EDF pour travailler au sein du Laboratoire de Mécanique des Solides de l'X récemment créé, sur des sujets de recherche liés à la sécurité du programme nucléaire français, mêlant sciences expérimentales et mathématiques appliquées, problèmes posés par l'ingénierie et recherche théorique, dans la discipline de la mécanique de la rupture dont il devient un des spécialistes. Il a donné le nom de notre mère à une de ses découvertes, l’Intégrale I.

Au cours d'un demi siècle de recherches, il est l'auteur ou le coauteur d'une centaine de publications, ainsi que de 4 livres traduits en plusieurs langues ; il participe au comité éditorial de plusieurs revues scientifiques de référence, est élu à l'Académie des Sciences en 1995, membre de l'Académie des technologies et de l'Académie Européenne des Sciences et fait l'objet de rencontres internationales autour de son travail scientifique, en 2006 en Grèce et en 2011 à Paris, où nombre d'entre vous étaient présents pour son plus grand bonheur.

Sa dernière publication, qu'il considérait comme le couronnement de sa recherche, date d'octobre dernier. La collaboration scientifique avec ceux qui étaient pour lui plus que des collègues, l'accompagnement à la fois fructueux et désintéressé de jeunes chercheurs, la reconnaissance de ses pairs, la rencontre avec d'autres savants d'autres disciplines, et même jusqu'aux pots, fêtes ou mariages au sein de la communauté scientifique, tout cela a nourri profondément la vie de notre père, qui avait voué sa vie à la science. Il s’était également beaucoup impliqué pour faire progresser les activités de recherches au Vietnam.

Pour nous, ses travaux sur la pyramide de Kheops et son ouvrage étaient les plus abordables.

Il était profondément attaché à sa famille, vibrant de tout cœur à ses joies et à ses réussites, mais aussi prenant très à cœur ses peines. Baptisé à l’âge de 26 ans, marié à Nguyen Thi Aï en 1964, père de deux fils, Raphaël et Jean, il était aussi le grand-père exemplaire de 4 petits-enfants que littéralement il adorait et dont il était très fier.

Il n’hésitait pas à parcourir le monde pour passer quelque temps avec sa famille, partant au Japon pour accompagner sa sœur pour le mariage de son neveu, venant s’occuper seul l’an passé de ses petits enfants en Turquie pendant la naissance du petit dernier aux Etats-Unis. Théo, le 3ème d'entre eux parle de lui et de son petit-frère : « Ce qui est triste, c'est que mon petit frère Sébastien ne connaîtra pas papi comme nous l'avons connu ».

Avec les témoignages que nous avons reçus d'anciens collègues et de ses amis, nous mesurons encore plus combien il était apprécié non seulement pour ses qualités scientifiques mais aussi pour sa gentillesse, sa modestie et sa générosité, toujours prêt à rendre service et connu pour son indifférence à l’argent. Il est resté comme le dit une de ses amies de jeunesse un « modèle de sagesse et de tendresse. »

Depuis sa grave maladie diagnostiquée en novembre dernier, il a abordé les traitements très lourds et difficiles avec beaucoup de courage, sans se plaindre alors qu’on savait qu’il souffrait. Il a accepté sa maladie non pas avec résignation mais philosophie, porté par sa foi. Il nous écrivait récemment : « pour moi la mort c'est la continuation de la vie sous une autre forme ». Il est parti avec une sérénité incroyable dans une grande confiance.

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L
Un mois avant son décès , on a échangé quelques mails ou il m'a dit qu'il avait parlé de ma théorie concernant la grande pyramide dans son dernier livre. Je lui dédis ma dernière vidéo sur le sujet ! http://youtu.be/XT4Db1JN5w8
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T
Cher Frère Raphaël, ton billet ainsi que celui d'Alain doivent être publiés dans La Jaune et la Rouge.<br /> Pour qu'un plus grand nombre de camarades puissent bénéficier comme moi, de cette sérénité induite par cette vie exemplaire que celle de ton père, que j'ai eu la chance de connaître dès mon arrivée à Paris, à la Maison de l'Indochine, en 1960.
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I
Quelle humilité, quelle simplicité.<br /> Nous avons beaucoup à apprendre de ces personnes qui travaillent dans l'ombre!
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